Sud-Soudan
La paix se cherche encore une place au Soudan du Sud, pays sinistré depuis 2013 par une violente guerre civile. Si les autorités sollicitent l’aide de leurs partenaires internationaux pour financer un récent accord de paix, des rapports soulignent que plusieurs millions de dollars ont été investis dans l’achat de voitures et dans la rénovation de maisons, au détriment de la paix.
Le média britannique The Guardian avait été le premier à révéler l’information. Ce jeudi, l’Associated Press s’en fait également l‘écho. Le comité chargé de superviser la transition fragile au Soudan du Sud a approuvé des dépenses de près de 185 millions de dollars en véhicules, restauration et rénovation de maisons de plusieurs cadres du pays.
Dans le détail des documents que l’Associated Press dit avoir consultés, c’est exactement l’achat de 1 000 véhicules et vivres, dont 50 000 tonnes de sorgho à livrer dans la capitale, Juba et dans l‘État natal du président Salva Kiir, Bahr el Ghazal qui a été autorisé par le comité. C‘était le 5 novembre, soit deux mois après la signature de l’accord de paix.
Entre décembre et janvier, le comité composé de représentants du gouvernement et de l’opposition a par ailleurs validé le décaissement de 135 000 dollars américains pour la rénovation du premier vice-président Taban Deng Gai et du défunt dirigeant révolutionnaire John Garang.
Ces dépenses faramineuses n’auraient peut-être pas attiré l’attention s’il ne s’agissait pas du Soudan du Sud, pays qui lutte farouchement contre une guerre fratricide qui a déjà fait 400 000 morts et des millions de déplacés. En septembre, les protagonistes au conflit ont conclu un énième accord de paix qui prévoit le retour du chef rebelle Riek Machar dans la capitale Juba, d’ici mai, pour récupérer le dauphinat présidentiel.
>>> LIRE AUSSI : Soudan du Sud – Application de l’accord de paix : Riek Machar attendu en mai La communauté internationale appelée à l’aide
Seulement, au-delà des promesses de paix, le Soudan du Sud a sollicité le soutien de ses partenaires internationaux pour financer cet accord. L’Etat avait lui-même promis une enveloppe de 1,4 million de dollars au fonds de transition pour la paix. Mais jusque-là, seuls 400 000 dollars ont été débloqués. Le Japon a déjà fait don d’un million de dollars.
Pour les experts, le manque de transparence dans la gestion des finances risque d‘ébranler la confiance des donateurs internationaux, déjà sceptiques sur le dernier accord conclu. Il est “évident que jusqu’à présent, seule une très petite partie des ressources disponibles au Soudan du Sud est utilisée pour soutenir le processus de paix”, a déclaré à l’Associated Press, Jan Hendrik van Thiel, l’ambassadeur d’Allemagne au Soudan du Sud.
“Les fonctionnaires passent des mois sans salaire tandis que les voitures des personnalités politiques sont achetées à prix d’or, a renchéri Edmund Yakani, directeur exécutif de la Community Empowerment for Progress Organization, une organisation locale de la société civile. De plus, les politiciens continuent d’exiger des donateurs qu’ils financent la paix”.
De son côté, le gouvernement sud-soudanais se défend de dilapider ses ressources, estimant “qu’il y a un budget prévu pour la rénovation des résidences des personnes qui dirigeront le pays”, a expliqué Martin Elia Lomuro, ministre des affaires présidentielles et membre du comité.
Quant aux 1 000 véhicules attendus, la compagnie dubaïote Green for Logistic Services, chargée de les livrer, a annoncé qu’elle avait rompu l’accord avec le président du comité, arguant de “l’instabilité de la sécurité dans le pays”. Déclaration faite par le directeur général Dip Sheth à l’AP.
>>> LIRE AUSSI : Soudan du Sud : un nouveau regain de violence menace l’accord de paix
01:38
Guerre au Soudan : une crise humanitaire sans précédent
02:09
ONU : la Russie bloque la résolution du Conseil de Sécurité sur le Soudan
01:12
Guerre au Soudan : le bilan des victimes largement sous-évalué
01:07
Le Soudan maintient ouvert le corridor d'Adré pour l’aide au Darfour
00:59
Soudan : au moins 124 morts lors d'un raid des paramilitaires à El Gezira
Aller à la video
Soudan : la crise de l'eau et la prolifération des maladies hydriques